LE FILM AU SERVICE DE L’HUMAIN ET DE LA PAIX

FILMS, GUERRES ET PAIX

Le film, par l’émotion qu’il suscite, se révèle comme extraordinaire instrument de communication, d’éducation des masses        et de construction de la paix. Pendant que certains ont cherché à se faire de l’argent en produisant des films de divertissement, d’autres n’ont pas hésité à utiliser le cinéma pour désinformer et manipuler l’opinion publique. Très vite, une troisième voix s’est dessinée avec l’intention d’éduquer, de sensibiliser et de construire la paix. C’est dans cette logique que s’inscrit les démarches de plusieurs organisations humanitaires dont la plus importante reste le Comité international de la CroixRouge.

L’aventure filmique de cette organisation a commencé avec celle de l’ère des médias qui a coïncidé avec l’explosion, vers 1910, des ouvertures de salle de cinéma fréquentés par des foules aussi passionnées et curieuses que bigarrées. Les premiers grands spectacles de divertissement populaires ont connu un grand succès, et ce même durant la crise de 1929. Les films de l’époque traitaient de sujets divers et variés : méfaits de l’alcoolisme et de la drogue, les dangers du vice, le triomphe de la loi et de la justice, la célébration des valeurs de la famille etc.

C’est dans ce contexte que la Croix-Rouge américaine, entre 1910 et 1914, ayant pris conscience du pouvoir du film capable d’émotionner les masses, commande à Thomas Edison, propriétaire de la plus grande compagnie cinématographique de l’époque, de réaliser cinq films sur la tuberculose ayant pour but de sensibiliser les spectateurs sur les risques de l’épidémie, tout comme aujourd’hui les gouvernements utilisent le cinéma pour protéger les citoyens contre les dangers de la Covid-19. En 1921, à l’occasion de la Xe Conférence internationale de la Croix-Rouge tenue à Genève, le CICR produit quatre films, réalisé par Jean-Blaise Junod, sur plusieurs thèmes dont le rapatriement des prisonniers de guerre et la lutte contre les épidémies. En 2005 la Croix-Rouge sort ces films en un double DVD, « Humanitaire et cinéma : films CICR des années 1920 »  

Plus tard, plusieurs réalisateurs indépendants ont nourri et réalisé des projets films qui promeuvent la paix. C’est le cas du réalisateur genevois Dominique Othenin Girard qui a signé en 2007 « Henry Dunant – du rouge sur la croix » consacré au célèbre Genevois, Henry Dunant, 1er prix Nobel de la paix en 1901 et fondateur de la Croix-Rouge en 1863. Le succès de ce film a été spectaculaire : plus de 20 télévisions ont été séduites.

S’agissant de la diffusion, pour toucher le plus large public, la Croix-Rouge américaine acquiert les droits de plusieurs films afin de parachever l’éducation populaire, avant que l’industrie cinématographique ne lui tourne le dos au profit de films divertissement à grande échelle. Le cinéma va évoluer d’une manière spectaculaire pour devenir le septième art qui va fasciner le monde entier. Les sociétés de Croix rouge, soutenues et encouragées par les gouvernements respectifs, vont s’adapter à cette évolution. La paix rétablie, ce soutien s’amenuise alors que le défi du maintien de la paix encore fragile est plus important que son rétablissement. Pour y remédier, certaines sociétés se lancent dans la production. En 1917, la Croix-Rouge américaine ouvre un Bureau of Picture qui produit des films documentaires sur ses activités. Ces films cherchent le soutien de la population et leur adhésion aux opérations humanitaires menées sur le terrain et aussi à vulgariser les mesures d’hygiène à respecter face aux maladies du moment.

Ainsi des équipes, dès 1918 et dans plusieurs pays, à bords de camions automobiles et dotés d’un matériel cinématographique mobile, sillonnent des villages pour offrir de la magie à des populations reculées. Plus tard, plusieurs pays nouvellement indépendants se sont inspirés pour créer des cinéclub afin d’éduquer les masses. Parfois, il faut comprendre par-là, les endoctriner.

Alors que l’industrie cinématographique versent dans l’appât du gain, les associations vont exploiter les locaux qui sont à la base destinés pour une autre mission pour diffuser des films. Plus tard, les organisations humanitaires œuvrant pour la construction de la paix ont exploité les cassettes VHS et les DVDs pour diffuser leur message de paix. Les associations du Croissant rouge ont fait autant, chacune dans son pays, pour se donner une visibilité et aider les populations souvent illettrées.

Aujourd’hui, c’est l’Internet qui sert de plateforme pour la diffusion de films et de vidéos visant la sensibilisation des masses et de construction de la paix social. Jamais les humains n’ont été autant connectés. Paradoxalement, les problèmes n’ont pas cessé d’accroitre à cause certainement du manque de communication. Alors qu’on assiste à l’explosion des moyens de communication, les dissonances augmentent entre les peuples. L’espoir est mis sur le film, par l’émotion qu’il génère et qui le caractérise, pour rompre cette dissonance et connecter les cœurs des gens. Telle serait la voie royale menant à la compréhension des entre humains et à la construction de la paix.

Tahar HOUCHI, Directeur artistique du Festival International du Film Oriental de Genève.

Source:

Sources : http://www.redcross.int/FR/mag/magazine2005_2/26-27.html

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