Présenté dans la Quinzaine des cinéastes, « Militantropos », de Yelizaveta Smith, Alina Gorlova et Simon Mozgovyi, décrit la condition humaine à travers les conséquences de l’invasion russe de l’Ukraine.
Le documentaire se présente sous la forme d’une trilogie composée de trois parties de septante minutes, portant chacune un titre, chacune explorant différents phénomènes de la guerre en Ukraine. « Humanité & Guerre » examine les effets de la guerre sur la vie quotidienne et le comportement des gens.
« Death & Life » traite de la perception de la mort et de l’expérience collective de la souffrance partagée. La troisième partie, « Espace & Temps », examine le lien entre la guerre et le reste du monde.
La scène d’ouverture montre l’entrée en gare de Kiev et un train d’évacuation pour Vienne, le quai est bondé. Dans la séquence suivante, on voit des secouristes fouillant les débris et éboulis d’immeubles, à la recherche de photographies. Dans une salle de conférences, on fait la distribution de mitraillettes et en explique l’usage aux personnes venues en nombre. Des vues du ciel, sans un nuage, accompagné par le gazouillis des oiseaux, soudain envahi par le vrombissement des avions. Des pelles remplies de terre qui recouvrent un cercueil. Des scènes de décombres de villes désolées se succèdent, une campagne qui
semble préservée tant que e la caméra ne se rapproche pas des campements de fortune …
Alors que les images venues d’Ukraine affluent sur les chaînes de télévision comme sur internet, « Militantropos » réussit à capturer la condition humaine et la vie qui continue tant bien que
mal, à travers les réalités fracturées de l’invasion russe de l’Ukraine. Le film reconstitue des quotidiens transformés par la guerre – ceux qui fuient que l’on voit faire la file, une valise à la
main, sur le quai du tram en partance pour Vienne ; ceux qui perdent tout et ceux qui restent pour résister et combattre, que l’on voit devant les débris de ce qui fut leur maison, qui mène à
paître la seule vache ou la seule chèvre qu’il leur reste. Dans ces scènes de détresse et de survie organisée, « Militantropos » filme sans voyeurisme en retraçant à la fois l’instinct de survie et le besoin de proximité. Au milieu de la dévastation et des atrocités, l’humain, absorbé par la guerre,
survit et résiste alors qu’inéluctablement, la guerre, à son tour, devient partie intégrante de l’humain.
Alina Gorlova, Yelizaveta Smith, Simon Mozgovyi, Maksym Nakonechnyi signent un documentaire d’observation qui aborde avec pudeur divers aspects de la survie des Ukrainiennes et des Ukrainiens en décrivant la guerre en Ukraine sous de nombreux angles. « Le chaos de la guerre déchire non seulement le monde physique, mais aussi le sens de soi », lit-on dans le synopsis du film. Le film a reçu une mention spéciale au Forum IDFA en 2023. » Certains de ces films transcenderont la documentation et deviendront du cinéma. » Rares sont ceux-là. « Militantropos » est l’un d’eux.
Le film pose et illustre comment la guerre crée un état d’existence altéré, modifiant notre relation à nous-mêmes et aux autres », a déclaré le jury. « [Cela] nous invite à réfléchir au rôle du réalisateur d’une manière nouvelle et à témoigner de la beauté d’une œuvre créée dans un esprit de collaboration forgé au milieu du conflit. »
La Quinzaine des Cinéastes a choisi « Militantropos » pour sa qualité de « film essentiel par son sujet, qui ramène des images inédites – comme on n’en voit pas dans les médias ».
Firouz E. Pillet, Cannes
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